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27/11/2010

Des effets négatifs du glyphosate sur du soja transgénique

Un article scientifique [1] publié en juillet 2010 démontre que le glyphosate a des effets négatifs sur du soja génétiquement modifié (OGM) pour le tolérer. Selon les résultats de l’équipe de Luis H.S. Zoebiol de l’Université de Maringua (Brésil), le glyphosate, substance active du Roundup, l’herbicide total de Monsanto, diminue l’activité de photosynthèse chez les plants de soja GM roundup ready. Le moment d’application du glyphosate sur les cultures a son importance comme l’expliquent les scientifiques. Ainsi, une application « précoce » et à faible taux permet aux plants de soja GM de récupérer des impacts du glyphosate. En revanche, une application tardive et en quantité supérieure du glyphosate ne permettrait pas cette récupération et engendre donc une diminution de la taille des feuilles et une production de biomasse moins grande, conséquence d’une activité de photosynthèse moins grande.

Pour leur expérience, les chercheurs ont cultivé sous serre des sojas RR1 (BRS242RR) et RR2 (AG3539RR) et les ont soumis à des traitements de glyphosate différant dans le temps et en quantité. Certains plants GM n’ont reçu aucun traitement à titre de contrôle. Les plants de soja RR1 correspondent à la première génération de soja transgénique tolérant les herbicides à base de glyphosate et commercialisés. Le soja RR2 correspond à la seconde génération, déjà commercialisée.
Selon les chercheurs, ces observations rejoignent d’autres résultats qui avaient montré que les traitements à base de glyphosate entraînaient une diminution des quantités de minéraux présents dans les plants GM, diminution alors pressentie comme pouvant être due à des effets négatifs du glyphosate sur la photosynthèse. Les chercheurs notent que le soja RR2, après traitement, a des feuilles plus petites et une production de biomasse inférieure à celle du soja RR1. Enfin, les scientifiques rappellent qu’une autre étude avait démontré que le glyphosate entraînait chez le soja RR1 une moindre efficacité d’utilisation de l’eau, le rendant donc possiblement plus sensible à la sécheresse que les plants non transgéniques.
Les chercheurs concluent donc que « le glyphosate cause des effets indésirables sur la photosynthèse et la production de biomasse sur les deux types de soja RR, de première et seconde génération. Ces résultats suggèrent que des stratégies de gestion des cultures sont nécessaires pour minimiser ces effets dans les champs, incluant notamment des quantités de glyphosate utilisées les plus faibles possible et des applications sur culture précoce, tout en prenant en compte les populations de mauvaises herbes et les périodes critiques de contrôle de ces dernières, afin d’assurer une croissance optimale des cultures ». Cette dernière observation sur les plantes environnant les cultures est très importante car des traitement avec du glyphosate à faible dose pourrait entraîner l’apparition plus rapide de plants résistants car ayant pu s’adapter plus facilement, du fait d’un traitement incomplet. On peut aussi s’interroger sur le fait de proposer, malgré les effets adverses, des « stratégies de gestion », au lieu de suggérer de revenir à des cultures non GM…

Eric MEUNIER , novembre 2010

[1] « Glyphosate affects photosynthesis in first and second generation of glyphosate-resistant soybeans », LHS Zobiole et al., 2010, Plant Soil 336 : 251-265

20/10/2010

La mauvaise graine de Monsanto, article du Monde

La mauvaise graine de Monsanto " Pigweed " (herbe à cochon) - surnom de l'amarante de Palmer - peut pousser de 5 centimètres par jour et atteindre plus de 2 mètres. ROBERT KING/POLARIS
Marianna, Forrest City (Arkansas, Etats-Unis) Envoyée spéciale
Les grandes cultures de l'Arkansas sont envahies par l'amarante de Palmer, une plante qui est devenue résistante à l'herbicide Roundup, produit par la multinationale. Convertis de longue date aux OGM, enrichis grâce à eux, les agriculteurs s'interrogent aujourd'hui sur leur avenir

Ken Smith, professeur d'agronomie à l'université de l'Arkansas, avait prévenu : " Vous verrez. Ce qui impressionne dans notre agriculture, c'est sa dimension et son intensité. " Effectivement, dans le Mid-South américain, l'agriculture ressemble à une industrie. Tout est disproportionné : les champs taillés au cordeau ; les machines pour semer, récolter, épandre les pesticides ; les tourbillons de poussière qui montent au ciel, soulevés par les cueilleuses mécaniques de coton et les pick-up des agriculteurs.

Mais, depuis quelque temps, les fermiers les plus modernes du monde doivent revenir à des outils d'un autre âge, la houe et la pelle, pour déloger la mauvaise herbe qui envahit leurs champs. L'amarante de Palmer est surnommée pigweed (l'herbe à cochon), entre autres vocables si grossiers que les agriculteurs n'osent pas les répéter. Ce n'est pas une petite herbe folle mais " un monstre ", dit Claude Kennedy, directeur de la station agricole expérimentale du bourg de Marianna : " Elle est de plus en plus agressive et prend des formes si étranges que parfois elle me fait presque peur. " La plante peut pousser de 5 centimètres par jour et atteindre plus de 2 mètres de haut. Avec ses branches tourbillonnantes, elle rappelle les arbres torturés qui peuplent les films du maître du fantastique, Tim Burton. Il arrive que ses racines cassent les moissonneuses.

Elle est le rejeton non désiré d'un mariage qui fut longtemps sans nuages entre les agriculteurs américains et les semences OGM Roundup Ready, la technologie phare de Monsanto. Le principe : un gène de tolérance à l'herbicide total Roundup est introduit dans une plante cultivée. Quand le produit est épandu, toutes les mauvaises herbes meurent, tandis que l'OGM survit.

Les agriculteurs de l'Arkansas parlent de l'âge d'or de ce système avec des étoiles dans les yeux. " Ces semences sont arrivées en 1996, se souvient Sid Fogg, cultivateur de coton et de soja. C'était formidable. On semait, on passait deux fois du Roundup et on avait les champs les plus propres, les plus jolis qu'on ait jamais vus. "

Aux Etats-Unis, 58 % du coton, 66 % du maïs et 93 % du soja sont Roundup Ready. La majorité des OGM cultivés dans le monde également, et le glyphosate, contenu dans le Roundup, est la molécule herbicide la plus utilisée sur terre. Dans l'Arkansas, le paysage a été bouleversé. Le labour - un moyen de lutter contre les mauvaises herbes - a été abandonné. La dizaine d'herbicides qui se partageaient le marché ont été balayés. Chacun a pu cultiver plus. Les exploitations se sont agrandies, les agriculteurs enrichis. " Tout était facile, trop facile " , laisse tomber l'agriculteur Bill Wilkie.

Cette époque bénie est révolue. " Mère Nature n'en a fait qu'à sa tête " , résume Sid Fogg. Au bout de quinze ans d'usage intensif et exclusif du glyphosate, une dizaine de mauvaises herbes, présentes à l'origine en quantités modestes, sont devenues résistantes au produit. Dont Amaranthus palmeri . " Le mécanisme de la sélection naturelle a joué, explique Ken Smith. Dans la population initiale, certains individus étaient naturellement résistants, ils se sont multipliés. "

Quelque 6 millions d'hectares sont touchés dans vingt-deux Etats américains, selon les dernières estimations, soit un peu moins de 10 % des surfaces OGM du pays. Le sud-est des Etats-Unis, coeur de la production de coton et de soja, est le plus concerné. Mais les herbes indésirables gagnent constamment du terrain. " Partout où il y a usage exclusif du glyphosate, le problème se posera tôt ou tard " , affirme Claude Kennedy. Des résistances ont déjà été observées dans une quinzaine de pays, dont la Chine, l'Argentine, le Brésil, ou le Canada.

" De nouvelles variétés de semences Roundup Ready continuent d'arriver sur le marché, comme l'alfalfa ou la betterave à sucre, relève David Mortensen, spécialiste des adventices à l'université de Pennsylvanie. Cela exacerbera le problème. " Ardent défenseur du glyphosate, qu'il compare à la pénicilline en médecine, l'universitaire australien Stephen Powles voit dans sa perte d'efficacité " une menace pour la production alimentaire mondiale " .

Dans l'Arkansas, l'explosion a eu lieu cette année. Les agriculteurs ont été pris par surprise. " On se disait que ça pouvait arriver, mais pas autant, aussi vite ", témoigne West Higgins devant l'un de ses champs, où son soja a littéralement été étouffé. Dans les restaurants où les agriculteurs se retrouvent pour petit-déjeuner avant l'aube, les pigweeds sont devenus le sujet numéro un de conversation. " Reflex, Treflex, Dual, Valor... " : attablés chez Cleo, à Marianna, Rusty Carter et Chad Russel, deux producteurs de soja et de coton, énumèrent les produits qu'ils tentent d'appliquer. De la " vieille chimie " , disent-ils. Le Treflan, qui figure en bonne place au Musée du coton de Memphis, date de 1964.

Certaines molécules font l'objet d'une surveillance de l'Agence américaine pour la protection de l'environnement (EPA) en raison des risques pour l'eau. Le dicamba, utilisé pour " brûler " les mauvaises herbes au printemps, est particulièrement agressif. C'est un dérivé du 2,4-D, un composant de l'agent orange, défoliant utilisé pendant la guerre du Vietnam. Au total, les traitements ont été au minimum multipliés par trois. " Mais rien n'en vient vraiment à bout ", observe Rusty Carter.

Alors, cet été, une armée de journaliers a désherbé à la houe les champs de coton dans tout le sud-est des Etats-Unis, du jamais-vu depuis les années 1960. " Le champ est propre pendant deux ou trois semaines, puis elles reviennent " , constate, amer, Chad Russel. Chaque femelle contient 250 000 graines. " Je crains que ça ne soit de pire en pire, souffle Bill Wilkie. Je ne sais pas où on va. "

" Parfois, je pense à mon père, se désole Sid Fogg. S'il voyait toutes ces mauvaises herbes, il me dirait, mon fils, qu'est-ce que tu fais ? " Surtout, tout cela revient très cher. En moyenne, 30 dollars supplémentaires par demi-hectare pour produire du soja, 70 pour du coton. Les rendements sont en baisse de 20 % à 30 %. " Cette affaire coûte des millions, affirme Ken Smith. Certains pourraient ne pas tenir l'année prochaine. "

Colby McChesney, 26 ans, n'a " pas l'intention de changer de métier " . " Je laisse complètement tomber le Roundup Ready, lance ce jeune homme, tout en parcourant en trombe ses 1 500 hectares. Certains s'accrochent à l'espoir que ça va aller mieux, moi je pense que, si on veut réparer le système, il faut tout changer. Sinon, on risque de perdre le contrôle. " L'année prochaine, il sèmera du coton et du soja LibertyLink, un OGM de Bayer. Il fonctionne avec un herbicide différent, relativement efficace sur Amaranthus palmeri . Le jeune agriculteur essaiera aussi des semences conventionnelles " pour voir " .

Beaucoup d'agriculteurs y pensent, à contrecoeur, comme une régression. Sid Fogg a tenté l'expérience sur quelques parcelles. Comme aucun semencier ne vend plus de variétés conventionnelles, c'est l'université de l'Arkansas qui lui a founi des graines. " Je ne vois pas pourquoi je continuerais à payer les semences Monsanto trois fois le prix des conventionnelles, alors que je vais dans les deux cas dépenser de l'argent en herbicides " , explique-t-il. Le problème, c'est qu'il n'y aura pas assez de graines LibertyLink et conventionnelles pour tout le monde l'année prochaine. Chuck Yates, le marchand de produits agricoles de Marianna, estime que 75 % de la demande seulement sera honorée.

Monsanto reconnaît que le problème est " sérieux " . " Nous pensions au départ que l'émergence de résistances serait difficile, affirme Rick Cole, chargé du dossier. Nous devons maintenant reconnaître que d'autres produits doivent être utilisés avec le Roundup pour les maîtriser. " L'entreprise se retrouve contrainte de faire la promotion d'herbicides vendus par des concurrents. Elle rembourse même 12 dollars par demi-hectare aux producteurs de coton qui y ont recours. Mais, selon elle, le Roundup " a toujours de la valeur ". " Il reste efficace sur 300 mauvaises herbes, les agriculteurs ont peut-être tendance à l'oublier, poursuit Rick Cole. Et les rendements des variétés Roundup Ready resteront compétitifs. "

Monsanto prépare déjà le coup d'après. Le semencier annonce pour 2014 un soja résistant au dicamba et au glyphosate. Et, deux ans plus tard, un coton résistant à trois herbicides différents. Ses concurrents sont également sur les rangs. " Celui qui arrivera le premier gagnera beaucoup d'argent ! " , s'amuse Rusty Carter.

Les anti-OGM dénoncent les promesses non tenues de Monsanto, qui a longtemps vanté les économies de pesticides réalisées avec les variétés Roundup Ready. " C'était vrai au début, mais pas sur le long terme " , confirme Colby McChesney. Mais, malgré leurs déconvenues, les agriculteurs de l'Arkansas ne sont pas devenus hostiles aux plantes transgéniques. Colby McChesney ne comprend rien au débat qui agite l'Europe : " Ça fait dix ans que je croque des graines de soja et je suis en parfaite santé. " Aucun ne regrette non plus d'avoir adopté ces semences. " Sur le coup, c'était vraiment une bonne affaire , résume Bill Wilkie. Maintenant il faut qu'on nous trouve autre chose. "

En veulent-ils à Monsanto ? Pas uniquement. " Tout cela est d'abord de notre faute, on n'a pas réfléchi, et on a utilisé trop longtemps un seul produit " , affirme Sid Fogg. " C'était comme une drogue " , renchérit Bill Wilkie. D'autres sont plus accusateurs. " Si ces semences avaient été promues correctement, on n'en serait pas là , souligne Joe Whittenton, un gros producteur de coton. Moi, j'ai toujours continué à utiliser d'autres herbicides par crainte des résistances. Les gens de Monsanto venaient chez moi et me disaient : "Laisse tomber, tu n'as pas besoin de tout ça !" Ils n'ont pas regardé assez loin dans le futur. "

Gaëlle Dupont
© Le Monde

01/08/2010

La fin du moratoire français sur la culture des OGM ?

par Anne Furet, Christophe Noisette et Guy Kastler, Réseau Semences Paysannes, 30 juillet 2010

Le 20 juillet, à la demande de plusieurs entreprises semencières [1], le ministre de l’Agriculture, Bruno Lemaire, a inscrit au catalogue français 36 variétés de maïs génétiquement modifié Mon810 et deux variétés de maïs GM T25 [2].

Ces deux maïs ont été autorisés à la culture en 1998 en Union européenne et font aujourd’hui l’objet d’une demande de renouvellement qui prolonge leur autorisation. Depuis 2008, la France a interdit la culture du Mon810 de Monsanto. L’autorisation de commercialiser ces 36 variétés ne remet donc pas en cause cette interdiction de culture, mais elle fait automatiquement accéder ces dernières au catalogue européen. Les entreprises françaises peuvent ainsi en commercialiser les semences dans les pays où le Mon810 n’est pas interdit [3].

Plus préoccupante encore est l’inscription des deux variétés de maïs T25 appartenant à deux sociétés françaises Orsem Hybrides et Maïsadour. Tolérant aux herbicides à base de glufosinate d’ammonium, l’évènement transgénique T25 de l’entreprise allemande Bayer [4] n’est pas cultivé sur le territoire européen. Interrogée par Inf’OGM, la Commission européenne précise qu’aucune variété de maïs T25 n’a été inscrite au catalogue européen. En effet, une autorisation de mise sur le marché de semences GM est subordonnée à l’inscription de variétés sur le catalogue. L’arrêté du ministre de l’Agriculture du 20 juillet pourrait donc conduire à ce que le T25 puisse être désormais cultivé sur l’ensemble du territoire européen. La France n’a pas déposé de clause de sauvegarde sur cet événement transgéni que, contrairement à l’Autriche [5]... Cela marquerait donc la fin de l’interdiction des cultures commerciales des OGM en France.

Interrogé sur ce point le 29 juillet, le ministère de l’Agriculture n’a pas encore répondu à nos questions. De son côté, le semencier français Maïsadour ne nous a pas indiqué si ces variétés pourraient être commercialisées lors des prochains semis et dans quelles régions.

Il convient de rappeler que l’usage du glufosinate d’ammonium n’est pas homologué sur le maïs en France, retirant de fait tout intérêt agronomique spécifique à la culture du maïs T25 pour les agriculteurs français. Il est en revanche autorisé pour désherbage avant mise en culture, ce qui permet de douter de la capacité de l’administration à contrôler le moment exact de son éventuel usage. Par ailleurs, une éventuelle multiplication de semences de T25 destinées à l’exportation pourrait être envisagée même sans utilisation de glufosinate d’ammonium. Comme les homologations des pesticides varient d’un pays à l’autre, l’utilisation de cet herbicide total sur le maïs pourrait être autorisée dans d’autres pays de l’UE. Mais nous n’avons pas réussi à savoir dans quels pays un tel usage serait éventuellement permis.

Il demeure difficile de connaître les raisons précises de l’inscription des ces variétés au catalogue. Mais cela pourrait être à rapprocher de la volonté des semenciers de valoriser au plus vite leurs obtentions OGM dans les pays où elles peuvent être cultivées. Par ailleurs, le Mon810 et le T25 attendent le renouvellement de leur autorisation de culture au niveau européen, doit-on y voir un lien ? S’agirait-il d’un pas pour faire faire homologuer le glufosinate d’ammonium sur le maïs et autoriser à la culture d’autres OGM résistants à l’herbicide total ? On pense notamment au Bt11 et au TC1507 actuellement dans les tuyaux des institutions européennes, et tout deux tolérant au glufosinate. De nombreux éléments doivent donc être éclaircis, mais aucune culture commerciale ne devra avoir lieu, en France, sans l’information du citoyen, comme l’exige l’article 10 de la loi de 2008 sur les OGM [6].

UE - Coexistence entre OGM et non OGM : la Commission assouplit (un peu) ses recommandations

par Christophe Noisette, 27 juillet 2010

Le 13 juillet 2010, la Commission européenne a publié, parallèlement à sa proposition concernant la gestion des autorisations, de « nouvelles lignes directrices » sur la coexistence des filières GM et non GM [1]. Ces lignes directrices viennent assouplir les précédentes, qui dataient de 2003, et comme elles, ce sont des recommandations non contraignantes. Ces principes édictés par la Commission européenne doivent permettre de limiter les différences entre les réglementations nationales.

Certains grands principes de 2003 restent d’actualité :
- la coexistence est un problème économique : il ne s’agit pas d’éviter les problèmes environnementaux car la Commission européenne le rappelle dans sa proposition l’évaluation environnementale et sanitaire des OGM intervient lors de l’examen des demandes d’autorisation ;
- la coexistence doit être réglementée par les Etats membres, car la réalité agricole de chaque Etat, voire de chaque région, est différente et une réglementation communautaire ne pourrait être adaptée à tous les cas ;
- et les lois qui régissent la coexistence doivent être « proportionnelles », de sorte que « les mesures de coexistence doivent éviter tout fardeau inutile pour les agriculteurs, les producteurs de semences, les coopératives et les autres opérateurs associés ».
Autre point commun avec les précédentes lignes directrices, « les questions relatives à la compensation financière ou à la responsabilité pour les dommages économiques sont de la compétence exclusive des États membres ».

Néanmoins, la recommandation est plus souple et opère des changements majeurs dans l’interprétation que fait la Commission européenne de la coexistence. Alors qu’en 2003, aucune distinction de traitement n’apparaissait entre les cultures conventionnelles et les cultures biologiques [2], la Commission européenne reconnaît en 2010 qu’il est « évident que la production biologique nécessite des efforts supérieurs de séparation ». Les producteurs biologiques seront heureux de le lire...

Par ailleurs, en 2003, la Commission européenne recommandait de ne pas adopter des règles de coexistence qui iraient au-delà de ce qui est nécessaire pour garantir des contaminations inférieures au seuil d’étiquetage établi politiquement à 0,9%. Cette assimilation du seuil d’étiquetage au seuil de contamination avait été vivement dénoncée par les organisations opposées aux OGM. Aujourd’hui, la Commission recommande qu’elles soient « proportionnées à l’objectif poursuivi (protection des exigences particulières des agriculteurs conventionnels ou biologiques) », et donc que les mesures de coexistence nationales puissent garantir un seuil de présence d’OGM inférieur à 0,9%, pour les producteurs biologiques ou certains producteurs conventionnels (on pense aux productions « sans OGM », aux AOC et à certains labels dont le cahier des charges exclut les OGM).
De même, ces nouvelles lignes directrices reconnaissent la possibilité, pour certaines zones géographiques particulières de se déclarer « zone sans OGM » afin d’éviter des contaminations. Cependant, la Commission européenne précise que « de telles exclusions devront reposer sur la démonstration par les États membres que, pour ces régions, d’autres mesures ne suffisent pas pour atteindre des niveaux de pureté suffisants ». Or, rien n’est dit sur ce qui sera valide ou non comme « démonstration »... Le flou demeure sur ce point.

John Dalli, commissaire à la santé, a présenté ces nouvelles lignes directrices parallèlement à une proposition de modification de la réglementation. Selon le commissaire, l’ensemble devrait permettre aux Etats d’accroitre la liberté d’interdire la culture des OGM autorisés. Pourtant, comme nous l’analysions dans un précédent article [3], c’est davantage le soutien politique des Etats sur les autorisations des OGM qui est recherché avec ce « package subsidiarité ».

05/04/2010

Historique de Monsanto

 
• 1901 John Francis Quenny nomme sa nouvelle entreprise Monsanto Chemical
Works, du nom de sa femme Olga Mendez Monsanto.

• 1902 La compagnie se lance dans la production de saccharine.

• 1917 Monsanto commence à produire de l’aspirine.

• 1929 Monsanto rachete la compagnie Rubber Services Laboratories basé à
Akron, Ohio et Nitro, Putnam County, West Virginia. Monsanto se lance
ainsi dans l’industrie chimique lourde. Nitro sera un de ses centres de
production des PCB.

• 1935 Rachat de la Swann Chemical Company, à Anniston Etats-Unis, c’est
ainsi que Monsanto Chemical Company se lance dans la production et la
vente de PCB

• 1935 Monsanto élargit ses activités à la production de savon et de
détergents industriels, elle commence à produire du phosphore.

• 1937 Monsanto prend connaissance des dangers lies à l’exposition aux PCB
d’apres une etude du Docteur Emett Kelly, qui dirige alors le service
médical de Monsanto.

• 1938 La firme se lance sur le marché du plastique, de nombreux produits
en plastique contiennent des PCB.

• 1939-1945 Des scientifiques travaillant pour Monsanto participent au «
projet Manhattan » qui aboutira à la production de la première bombe
atomique de l’Histoire. Le Dr. Charles Thomas, qui sera plus tard membre
du comité directoire, assistera aux tests et à l’explosion de la Bombe A.

• 1949 Accident industriel à l’usine de Nitro, de nombreux ouvriers sont
exposés à des produits chimiques contenant de la dioxine.

• 1955 Monsanto rachète les raffineries de Lion Oil et se lance dans la
production d’engrais à base de dérivés pétrochimiques.

• 1959 La firme ouvre une nouvelle branche nommée « Monsanto Electronics
Co » à Palo Alto, et qui produit du silicone ultra pure pour les
industries de pointes. Plus tard, le site de production sera classé «
superfund site » par l’Agence de Protection de l’Américaine, c’est-à-dire
une zone contaminée par des déchets dangereux à dépolluer en priorité.

• 1959 Monsanto découvre le 2,4,5-T et se lance dans la production de
l’herbicide Lasso. L’herbicide de Monsanto, plus connu sous le surnom d’ «
Agent Orange », sera vendu à l’armée américaine pour défolier la jungle
vietnamienne de 1961 à 1971. L’Agent Orange a été produit par plusieurs
firmes dont Dow Chemicals. Il a été reconnu que ces herbicides contenaient
de fortes concentrations de dioxine qui a causé de troubles médicaux parmi
les soldats américains et continue de d’affecter la santé de la population
vietnamienne.

• 1969 Une étude rend public la nocivité de l’herbicide 2,4,5-T, d’après
l’Institut National de la Santé révélant que des souris soumises à des
doses importantes du désherbant développaient des malformations fœtales et
mettaient au monde des bébés mort-nés.

• 1970 Création de l’Agence Américaine de Protection de l’Environnement.

• 1970 La FDA découvre la contamination d’Anniston et de ses environs par
les PCB de l’usine de Monsanto.

• 1972 Le Pr Berg réussi à franchir la « barrière des espèces » en
combinant l’ADN d’une plante avec un gène issu d’une bactérie.

• 1975 Mise sur le marché du Roundup.

• 1976 Monsanto produit Cycle-Safe, la première bouteille en plastique
pour du soda. La bouteille, suspectée de poser un risque cancérigène, sera
retirée l’année suivante par la Food and Drug Agency.

• 1977 Interdiction de la production et de la vente des PCB aux Etats-Unis.

• 1978 Ouverte de la Class Action des Vétérans du Vietnam contre les
producteurs de l’Agent Orange.

• 1979 Un train de marchandise transportant 70000 litres de chlorophénol
déraille à Sturgeon, Missouri. La cargaison venait d’une usine de Monsanto
et contenait de la dioxine.

• 1980 Monsanto Débute ses tests en ferme sur la Recombinant Bovine
Somatotropin (rBST), ou recombinant Bovine Growth Hormone (rBGH),
c’est-à-dire l’hormone de croissance laitière.

• 1981 L’entreprise pharmaceutique G.D Searle & Company obtient
l’autorisation de commercialisation de NutraSweet. Ce substitut de sucre
avait été refusé par la FDA pour cause d’études suggérant un possible lien
entre la consommation du produit et des risques de cancer du cerveau.
Searle sera racheté par Monsanto en 1985 pour devenir sa filiale
pharmaceutique.

• 1983, les représentants de trois laboratoires, dont Monsanto, annoncent
simultanément qu’ils sont parvenus à insérer une construction génétique,
en l’occurrence un gène de résistance à un antibiotique, dans des cellules
de pétunia ou de tabac.

• 1984 Ouverture du procès « Kemner V. Monsanto »

• 1986 Monsanto est jugé coupable de négligence pour l’exposition au
benzène d’un de ses ouvriers à l’usine de Chocolate Bayou au Texas. La
firme devra payer 100 millions de dollars de dédommagement à la famille de
Wilbur Jack Skeen, mort de leucémie après des expositions répétées.

• 1986 Monsanto dépense 50.000 dollars en frais d’avocat pour empêcher
l’initiative (Proposition 65) de l’Etat de Californie visant à réglementer
la décharge de produits toxiques prêts de réserves d’eau potable.

• 1987 Class action des Vétérans, Monsanto et les producteurs de l’Agent
Orange sont condamnés à verser 180 millions de dollars afin de regler
l’affaire à l’amiable. Monsanto avait présenté à ce procès des preuves
scientifiques décisives démontrant l’absence de lien entre l’exposition à
la dioxine et les nombreux cancers dont souffraient les vétérans. Il sera
démontré au début des années 90 que ces études étaient biaisées.

• 1989 Margaret Miller, ancienne chercheuse pour Monsanto, rentre à la FDA.

• 1989 Samuel Epstein révèle dans le Los Angeles Times que Monsanto revend
à des coopératives la viande et le lait issus de ses fermes expérimentales
sur la rBGH.

• 1990 Greenpeace révèle dans un rapport intitulé Science for Sale, que
des scientifiques de Monsanto auraient biaisés des études sur la dioxine
afin de conclure à son caractère non cancérigène pour l’homme. Ces études
avaient servi de preuves pour débouter les vétérans dans leur action
contre l’agent orange.

• 1990 Monsanto dépense plus de 405.000 dollars en frais d’avocats pour
faire rejeter la réglementation californienne Proposition 128, connue sous
le nom de « Big Green initiative ». Cette régulation visait à interdire
l’usage de certains pesticides nocifs pour la santé et l’environnement,
dont l’Alachlor de Monsanto.

• 1991 M. Taylor, ancien avocat de Monsanto, devient Numéro 2 de la FDA.

• 1991 Monsanto est condamné à payer une amende de 1,2 millions de dollars
pour avoir tenté de dissimuler le déversement d’eaux usagées et polluées
dans la Mystic River dans le Connecticut.

• 1992, la Food and Drug Administration publie dans le Federal Register sa
réglementation concernant les « aliments dérivés des nouvelles variétés de
plantes ».

• 1993 La FDA autorise la mise sur le marché du Posilac de Monsanto, le
nom commercial de l’hormone de croissance laitière (rBGH). Le Posilac est
le premier produit issu de la recherche transgénique à être autorisé à la
consommation.

• 1993 Monsanto dépose le brevet de son premier OGM résistant a
l’herbicide Roundup, il s’agit du soja Roundup Ready (RR) et demande une
mise sur le marché dès 1994.

• 1995 Ouverte du procès « Abernathy vs Monsanto » pour la contamination
de Anniston par les PCB..

• 1995 Shapiro devient directeur de Monsanto, début de la « révolution
culturelle » de la firme.

• 1996, la firme de Saint-Louis contribue généreusement à la campagne pour
la réélection du président Clinton, lequel rendra hommage à Monsanto dans
son discours sur l’état de l’Union, le 4 février 1997.

• 1996 Monsanto est condamné par un tribunal de New York pour pub
mensongère sur la « biodégradabilité » du désherbant Roundup.

• 1997 Le journal Seattle Times rapporte des faits incriminant Monsanto
pour avoir supposément vendu 6000 tonnes de déchets dangereux à plusieurs
compagnies productrices d’engrais. Ces déchets étaient contaminés avec le
metal lourd cadmium, que l’on suspecte de causer des cancers, des
dysfonctionnements rénaux et neurologiques ainsi que des troubles de la
grossesse.

• 1997 Fox News censure un reportage de la journaliste d’investigation Mme
Akre sur le Posilac (rBGH) de Monsanto.

• 1999 Après de fortes pressions internationales, et une interdiction de
l’ONU, Monsanto décide de ne pas commercialiser des graines contenant le
gène « terminator » provoquant la stérilisation des graines.

• 2001 Révélation de la contamination du mais « criollo » mexicain par des
gènes RR et Bt de Monsanto, selon un article de I. Chapela et D. Quist
paru dans Nature le 29 novembre 2001.

• 2002, 23 février Le jury déclare Monsanto et sa filiale Solutia
coupables d’avoir pollué « le territoire d’Anniston et le sang de sa
population avec les PCB » (Anniston Star, 23 février 2002). Les dommages
et intérêts sont fixés à 700 millions de Dollars.

• 2003 Solutia, la filiale de Monsanto qui produisait les PCB, a été
déclarée en faillite, à cause notamment des litiges et dédommagements à
verser dans les différents procès pour pollution.

• 2006 The Guardian révèle que le chercheur sur le cancer Sir Doll a
travaillé secrètement pour Monsanto pendant vingt ans, comme le prouve une
lettre de 1986 de Monsanto qui lui était destinée et qui confirmait le
renouvellement de son contrat à hauteur de 1500 dollars par jour.

• 2007 Monsanto est condamné en France pour publicité mensongère sur le
caractère biodégradable du Roundup.



et çà continue...